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Virginie DO

  • Chercheuse en Intelligence Artificielle
  • Microsoft
  • 29 ans
  • Marrainée par Anne BOUVEROT en 2025

Pourquoi la tech ?

J’ai découvert l’intelligence artificielle (IA) au cours de mes études scientifiques. C’était un débouché assez naturel et très à la mode lorsque je finissais ma formation en mathématiques et informatique en 2019. C’est surtout un domaine passionnant à la fois d’un point de vue scientifique et sociétal. L’ampleur de son impact m’a donné envie de contribuer à son développement, tout en prenant en compte les enjeux de responsabilité et de sûreté. Aujourd’hui, l’IA occupe plus que jamais le devant de la scène : les avancées scientifiques et technologiques de ces dernières années sont stupéfiantes.

Votre parcours ?

J’ai étudié en classe prépa puis à l’École Polytechnique, avec une spécialisation en maths. Mon master à Oxford a été un déclic : j’y ai découvert des thématiques qui m’ont donné envie de faire de la recherche, alors que je n’avais pas prévu de faire un doctorat. J’ai ensuite entamé une thèse CIFRE entre l’Université Paris Dauphine-PSL et le laboratoire FAIR de Meta à Paris. C’est ainsi que j’ai commencé la recherche en IA, dans un environnement de travail très stimulant et exigeant sur le plan scientifique.

Votre première expérience professionnelle dans la tech ?

J’ai fait quelques stages dans la tech, mais mon expérience a vraiment commencé pendant mon doctorat. Mon travail portait sur les biais et les questions d’équité dans les algorithmes d’IA, en particulier dans les systèmes de recommandation. La question centrale de ma thèse est : Comment mesurer et contrôler les inégalités de visibilité entre différents créateurs de contenu sur les plateformes ?

Que faites-vous aujourd’hui et pourquoi ?

Je suis chercheuse en IA dans une équipe qui travaille sur les grands modèles de langue (ou large language models, LLMs). Depuis l’irruption de ChatGPT, ces modèles sont devenus incontournables. Je ne voulais pas rester à l’écart de ce tournant technologique majeur ou travailler sur des méthodes obsolètes – même s’il y a beaucoup d’effets d’annonce et que d’autres technologies d’IA continuent d’avoir un impact sociétal très fort. J’ai donc choisi de me former pour contribuer à ce champ de recherche en pleine effervescence. Les questions ouvertes sont nombreuses : comment assurer la sûreté et la responsabilité de ces modèles de plus en plus puissants ? Dans quels domaines peuvent-ils avoir le plus d’impact ? Ces dernières années, plusieurs travaux ont montré qu’ils pouvaient notamment aider à la découverte scientifique, c’est très enthousiasmant.

Vos atouts pour ce poste ?

Le goût d’apprendre et de travailler en équipe ! J’aime travailler dans une bonne ambiance et apprendre de mes collègues, c’est ce qui me motive au quotidien.

Vos défis passés, vos ratés, vos grands moments de solitude ?

La première année de thèse a été difficile. C’était pendant la période du Covid, l’isolement était dur à vivre, et j’avais du mal à trouver une direction de recherche claire. Mes premiers articles ont été refusés. Heureusement, j’ai été très bien soutenue, par mes mentors scientifiques comme par mes proches. Ce soutien m’a permis de persévérer et de progresser.

Vos meilleurs moments, les succès dont vous êtes fière ?

Recevoir le prix Jeune Talent L’Oréal-UNESCO « Pour les femmes et la science » a été un grand moment de fierté que j’ai pu partager avec ma famille. Mais c’était aussi une opportunité unique de rencontrer des femmes scientifiques incroyables de disciplines très variées. J’étais très heureuse de me faire de nouvelles copines !

Des personnes qui vous ont aidée/marquée ou au contraire rendu la vie difficile ?

J’ai eu la chance de rencontrer de nombreuses personnes qui m’ont beaucoup appris et soutenue. Je ne peux pas toutes les nommer ici : mentors, collègues, ami·es… Parfois, il s’agissait d’un accompagnement sur plusieurs années ; d’autres fois, un simple café ou une réponse bienveillante à un email ont eu un impact très positif. Ces dernières années, j’ai beaucoup travaillé avec Nicolas Usunier. Il a co-dirigé ma thèse et a profondément influencé ma manière de réfléchir et de faire de la recherche.

Vos envies et défis à venir ?

Continuer à travailler avec des gens sympas sur des sujets intéressants. C’est peut-être naïf, mais le côté aliénant du travail peut faire oublier ces éléments essentiels.

Et que faites-vous en dehors de votre travail ?

Beaucoup de musique ! J’adore aller à des concerts et jouer des instruments de musique, en ce moment surtout de la batterie. J’aime aussi le cinéma et aller au pub (j’habite en Angleterre !).

Vos héroïnes (héros) de fiction, ou dans l’histoire ?

Virginia Woolf, pour la force de ses romans et de sa pensée sur la condition des femmes, et l’incroyable modernité de ses écrits.

Votre devise favorite ?

“Les choses difficiles, ce sont des sommes de choses simples.” C’est une citation de mon professeur de physique de prépa, Yann Brunel. Elle s’applique bien à la résolution d’exercices de physique, mais aussi à beaucoup de situations dans la vie !

Un livre à emporter sur une île déserte ?

C’est difficile d’en choisir un. Le dernier livre que j’ai lu et adoré est Just Kids de Patti Smith.

Un message ou un conseil aux jeunes femmes ?

La recherche en sciences, notamment en IA, peut parfois être un milieu difficile. C’est essentiel de s’entourer de personnes bienveillantes – et il y en a.

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LE QUESTIONNAIRE
DU CHATELET

Le questionnaire auquel répondent les Femmes de tech est une variante du questionnaire de Proust, ainsi nommé non pas parce que Marcel Proust se serait égaré dans le métro parisien, mais en mémoire d’Emilie du Chatelet, femme de lettres, mathématicienne et physicienne, renommée pour sa traduction des Principia Mathematica de Newton et la diffusion de l’œuvre physique de Leibniz. Elle fût membre de l’Académie des sciences de l’Institut de Bologne. Emilie du Chatelet mena au siècle des Lumières une vie libre et accomplie et publia un discours sur le bonheur.

Emilie Du Chatelet

Femme de lettre, mathématicienne, physicienne

1706 - 1749