Qui est Elsie Eaves ?

Elsie Eaves naît en 1898 à Idaho Springs, Colorado, et manifeste très tôt un intérêt pour l’ingénierie et les mathématiques. Première femme à intégrer l’American Society of Civil Engineers, elle joue un rôle clé dans l’introduction des statistiques dans le secteur de la construction, permettant ainsi d’optimiser la planification des projets et d’améliorer la fiabilité des infrastructures en se basant sur des modèles scientifiques.

Sa formation : Ingénieure en génie civil à l’Université du Colorado

Elsie Eaves montre un goût précoce pour les mathématiques et une curiosité naturelle pour l’industrie minière, et, en conséquence, décide de se former en Génie Civil. En 1918, à Boulder, Université du Colorado, elle est la première femme élue présidente de la Société d’Ingénierie des élèves de l’école, ce qui lui vaut une couverture nationale dans les publications spécialisées. Elle aide Lou Alta Melton et Hilda Counts à créer l’American Society of Women Engineers and Architects en 1919. En 1920, elle est la première femme diplômée en génie civil.

Carrière professionnelle et apports

Après avoir brièvement enseigné les mathématiques pour l’ingénierie, Elsie Eaves commence sa carrière comme dessinatrice au US Bureau of Public Roads à Denver, puis à la Denver and Rio Grande Western Railroad Company.

Comme ingénieure en structures, Elsie Eaves contribue à plusieurs infrastructures majeures telles que le Hoover dam, barrage sur le fleuve Colorado, participant à l’élaboration des méthodes modernes de conception et de réalisation des ouvrages d’art.

Elle se spécialise ensuite dans l’ingénierie des coûts dans les domaines du transport et du logement. En 1926 commence une collaboration de 37 ans avec McGraw-Hill à New-York qu’elle rejoint comme responsable adjointe pour les études de marché publiées par Engineering News – Record (ENR). Quelques années plus tard, elle est promue responsable du département d’Economie de la Construction, dirigeant la publication d’ENR et de  Construction Methods and Equipment. Entre temps, en 1927, Elsie Eaves devient la première femme membre à part entière de l’American Society of Civil Engineers (ASCE).

En 1929, Elsie Eaves compile le premier inventaire national concernant le traitement des eaux usées industrielles. Elle rassemble également les statistiques nécessaires portant sur les besoins en constructions neuves, contribuant ainsi à revitaliser le secteur du BTP (Bâtiments et Travaux Publics) pendant la Grande Dépression. Après la seconde guerre mondiale, Elsie Eaves devient directrice de Business News. Elle organise et dirige l’évaluation par ENR de la planification d’après-guerre qui sert de rapport d’étape officiel pour l’industrie de la construction.

Une fois à la retraite, qu’elle atteint en 1963, Elsies Eaves reste conseillère à la National Commission on Urban Affairs pour les coûts du logement, ainsi qu’auprès de l’International Executive Service Corps pour les coûts de construction en Iran.

Une femme engagée aussi dans l’enseignement supérieur

Alice Recoque a enseigné pendant 20 ans l’informatique, notamment la structure des ordinateurs, principalement à l’Institut Supérieur d’Électronique de Paris, à l’École Centrale Paris, à l’École Supérieure d’Électricité, à l’École Supérieure d’Ingénieurs en Électrotechnique et Électronique et à l’Institut Catholique de Paris. Elle dit avoir pris beaucoup de plaisir à enseigner car le « fait de n’avoir eu aucun support de cours préalable, vu l’époque, a compliqué l’exercice, ce qui l’a rendu plus enrichissant » reprenant ainsi une citation de Jacques Arsac.

Une femme engagée dans la cause des femmes

À la même époque, Elsie Eaves devient un mentor et une source d’inspiration pour les jeunes femmes attirées par l’ingénierie, et ce dans l’ensemble des domaines couverts par le STEM (Science, Technology, Engineering and Mathematics). Elle défend leurs droits et promeut leur inclusion dans ces activités dominées par les hommes.

Pourquoi est-elle une Femme pionnière de la tech ?

Elsie Eaves a ouvert la voie à une approche plus scientifique de la gestion de chantier, préfigurant les logiciels modernes de simulation et de modélisation. Elle a joué un rôle précurseur dans la structuration de la donnée à une époque où l’ordinateur n’existait pas encore.

Quelle reconnaissance d’hier et d’aujourd’hui ?

1957 : première femme admise à l’American Association of Cost Engineers

1974 : George Norlin Silver Medal, plus haute distinction de l’Université du Colorado à ses alumni.

1979 : première femme membre honoraire à vie de l’American Society of Cost Engineers (ASCE)

1980 : Fellow award at the Society of Women Engineers National Convention

Première femme élue Chapter Honor member de la Chi Epsilon fraternity (National Civil Engineering Honor Society in the United States).

Témoignages d’Elsie Eaves (extraits d’article)

« De nombreux lecteurs d’ENR (Engineering News Records) venaient consulter les rédacteurs lorsqu’ils avaient besoin rapidement d’informations spécifiques. Bien sûr, la réceptionniste m’appelait lorsqu’il s’agissait de coûts et de statistiques. Au début, je voyais le visage de l’appelant se décomposer lorsque j’arrivais et qu’il pensait être refilé à un employé subalterne. Je lui expliquais donc toujours que tout le monde chez ENR était hautement spécialisé et que, s’il me disait de quelles informations il avait besoin, je le mettrais en relation avec la personne compétente. Je répondais alors à sa première question, puis à la deuxième, parfois à la troisième, et il se réjouissait et me demandait : « Vous n’êtes pas ingénieur, n’est-ce pas ? ». Chacun appréciait cette découverte et j’avais un bon ami qui me donnait plus d’informations que je ne lui en donnais moi-même. »

« Je me réjouis du nombre croissant de femmes dans l’ingénierie des coûts. Ma conviction qu’elles ont une vision particulière et apportent des talents complémentaires à la profession est renforcée par les postes de plus en plus importants qu’elles occupent et les fonctions importantes qu’elles exercent au sein de l’AACE (Association for the Advancement of Cost Engineering). »

Une femme inspirante pour…

« J’admire profondément Elsie Eaves, cette pionnière qui, bien avant l’ère de l’informatique, a su transformer l’ingénierie en y apportant une rigueur de la donnée visionnaire. Son audace, son intelligence et sa capacité à ouvrir des portes jusque-là fermées aux femmes font d’elle une source d’inspiration pour toutes celles intéressées par les métiers du BTP. »

Laure Ducoulombier, Chercheuse en Construction 4.0 à Centrale Lille, et membre du réseau des Femmes de Tech de l’Académie des technologies.

Références

– Wikipédia et diverses sources
– Magazine de la Society of Women Engineers (SWE)
– “The changes of one life-time“ (article d’Elsie Eaves)

Illustration réalisée à l’aide d’une IA, à partir d’une photo d’Elsie Eaves