Académie des technologies

Crise du COVID-19 – accélérer la transformation numérique : pour une France plus agile et moins dépendante

Avis de l’Académie des Technologies

La situation de confinement dans laquelle a été plongé notre pays et une grande partie de la planète a conduit à une accélération de l’usage des techniques numériques pour compenser la limitation des déplacements. Cette accélération s’est accompagnée d’une appropriation remarquable des moyens numériques disponibles par les citoyens ainsi que par de multiples organisations privées ou publiques. De nouveaux usages et de nouvelles applications se sont multipliées dans de nombreux domaines comme ceux de la santé, de l’enseignement ou relevant de l’activité économique comme l’organisation du travail ou la grande distribution.

Dans ces domaines les initiatives qui ont émergé vont bien au-delà de mesures palliatives de l’absence de mobilité. Elles constituent des avancées indiscutables dans leurs domaines respectifs, et permettent d’anticiper une transformation systémique de ces activités. Le confinement a ainsi révélé, malgré le caractère dramatique de l’épidémie, une opportunité de « modernisation » vertueuse du pays. Cette évolution est portée par la prise de mesure en vie réelle d’avantages concrets qui vont au-delà de la réduction des déplacements : suivi médical à domicile, possibilité de travailler ou d’être éduqué à distance, développement de circuits courts de distribution de produits agricoles par exemple. Parallèlement, la satisfaction de ces besoins a mis en exergue l’importance des infrastructures pour une transformation numérique partagée par tous et qui réponde aux exigences de diversité, d’agilité, de créativité que la crise a révélées mais aussi à des critères de confidentialité, d’indépendance ou de souveraineté.

Les plateformes sont des infrastructures logicielles qui facilitent voire automatisent la mise en relation, l’échange, la conception et le déploiement de services en ligne, entre différents acteurs (individus, machines, organisations). Elles accompagnent la transformation des organisations dans leurs usages pour tenir compte dans l’accomplissement de leurs missions, d’un contexte généralisé de communications et traitements numériques. Elles deviennent alors constitutives d’un écosystème : par exemple patients/ soignants/ établissements de soin/ fournisseurs de solutions dans la santé, enseignants/ enseignés/ éditeurs de contenu dans l’éducation ou encore collaborateurs/ clients/ fournisseurs dans les entreprises commerciales.

La mise en œuvre de ces plateformes est réalisée au sein d’une architecture dite de « cloud » qui comporte trois étages Le premier est constitué par les ressources matérielles (serveurs, stockage de données, communications) nécessaires au support d’une plateforme et de ses applications. Le second étage est la plateforme elle-même, gestionnaire des données, de leur collecte, de leur protection et des échanges ; le troisième regroupe les applications accessibles à distance.

Dans 4 domaines essentiels à la vie du pays (Santé, Education, Agriculture, Organisation du travail) l’Académie a constaté des limitations considérables à la dynamique d’adoption de nouveaux usages et de création de nouveaux services (2° partie de l’avis). Ces limitations sont liées pour partie à l’insuffisance d’infrastructures de communication et de traitement, mais elles résultent surtout de l’absence du déploiement de plates formes adaptées à chaque domaine.

Afin de lever ces limitations, en assurant à notre pays les conditions de son indépendance et de sa souveraineté (voir 3° partie de l’avis), l’Académie des Technologies recommande que :

  1. des politiques de transformation des administrations et des entreprises fondées sur l’élaboration de plateformes numériques soient systématiquement engagées pour celles qui n’ont pas encore commencé ou accéléré lorsque cette transformation a débuté ;
  2. les plateformes utilisées en France et en Europe reposent sur les standards nés de l’initiative Franco-Allemande de fédération de clouds souverains intitulée GAIA-X ;
  3. soit évité le recours à des systèmes intégrant verticalement les trois étages du « cloud computing » opérées par le même fournisseur, pour favoriser des solutions reposant sur des fournisseurs différents lorsque les critères d’indépendance et/ou de souveraineté sont primordiaux ;
  4. soit développée, pour les organisations aux multiples implantations, une structure en réseau des plateformes faisant coexister des traitements centralisés avec des traitements plus locaux au plus près de la production de données (« edge computing ») afin d’assurer performance et résilience des plateformes ;
  5. le recueil des données telles que celles prévues au DMP (Dossier Médical Partagé) ne soit pas une description figée et sous dimensionnée par rapport au besoin et en regard des travaux de recherche qui peuvent être réalisés sur les données recueillies, et que l’élaboration d’un tel outil soit supervisée par un organe de gouvernance ;
  6. la définition des données essentielles du monde éducatif fasse également l’objet d’une supervision à l’échelle nationale assurant normalisation, précision, évolutivité et interopérabilité de ces données ;
  7. soient recensés les besoins moyen/long terme de transformation digitale des administrations ou des entreprises et de démarrer des expérimentations, portées par des acteurs français ou européens, pour une seconde génération de solutions sur les besoins déjà identifiés, et pour une première génération sur les besoins non encore couverts.

 

La crise a favorisé l’appropriation de nouveaux usages et des initiatives foisonnantes

Les quatre domaines examinés (Santé, Enseignement, Agriculture, Organisation du travail) présentent tous les mêmes caractéristiques en termes d’adoption de nouveaux usages et de développement de nouvelles possibilités. Les solutions qui ont émergé dans chacun de ces domaines portent en elles les prémices d’une transformation systémique du domaine concerné. Dans d’autres secteurs comme la vente de détail de produits manufacturés ou le MultiMedia, les transformations numériques étaient déjà largement engagées et la crise a conduit à une véritable explosion des usages du commerce électronique et de la vidéo à la demande confirmant aussi l’intérêt de transformations numériques similaires appliquées à d’autres domaines.

Santé. Ce domaine a été marqué par une explosion sans précédent de la téléconsultation. Ainsi en avril, au moment du pic de l’épidémie plus du quart des consultations l’ont été à distance et plus de la moitié des médecins libéraux se sont convertis à cette pratique (https://itrnews.com/articles/184984/la-crise-du-covid-19-un-tremplin-hors-normes-pour-les-marches-de-la-teleconsultation.html). Par ailleurs plusieurs applications de suivi à domicile de malades atteints par le Covid-19 ont été développées par de nombreux CHU. Ces applications (comme Covidom de l’AP-HP) permettent aux patients de répondre à des questionnaires journaliers via leur téléphone portable et préfigurent ainsi des solutions plus sophistiquées de télémédecine qui permettront le suivi permanent de patients atteints de maladies chroniques, et qui sont un élément de réponse au problème des déserts médicaux. De telles solutions sont en gestation : elles intégreront des capteurs dédiés connectés, mais pourront aussi s’appuyer sur d’autres types d’objets connectés telles que des montres, qui peuvent fournir des éléments de diagnostic sur les personnes qui les portent. L’utilisation d’échanges automatisés entre les objets connectés les plus utilisés, les téléphones portables, a permis le développement d’applications de traçage numérique de personnes susceptibles d’être infectées, telles que StopCovid. Enfin, il faut également souligner la soudaine montée en puissance de l’utilisation de supercalculateurs de très haute puissance (pour la plupart conçus et fabriqués en France) par des équipes de recherche qui n’en avaient pas l’habitude dans les domaines de l’épidémiologie ou de l’étude de la maladie au travers de la modélisation moléculaire ( http://www.genci.fr/fr/node/1045).
Enseignement. Un très grand nombre d’élèves du primaire et du secondaire ont eu recours, souvent de façon très intermittente, à des pratiques de télé enseignement qui ont permis de maintenir un minimum de continuité pédagogique. Dans ce contexte il est remarquable de constater le grand engagement des enseignants pour maintenir un lien avec les élèves pendant cette période. Que ce soit par des logiciels disponibles au niveau national ou des établissements mais manquant souvent d’ergonomie ou présentant une saturation rapide du nombre d’utilisateurs, que ce soit en improvisant des approches combinant courrier électronique, visioconférence , téléphone de nombreux enseignants ont fait preuve de persévérance, d’imagination, de créativité pour rechercher des solutions techniques tout en inventant de nouvelles méthodes pédagogiques plus appropriées à l’usage de ces outils. De fait la prise de conscience des apports du numérique éducatif a été accélérée par cette épreuve collective. L’intérêt d’approches hybridées (présentiel/distanciel ; synchrone/asynchrone ; classe « normale » /classe inversée…) fait son chemin dans les esprits. Les positions des professeurs les plus réfractaires au numérique éducatif semblent évoluer positivement.

Agriculture. La fermeture des marchés urbains a conduit, selon Ipsos, plus d’un agriculteur sur 10 à rechercher des solutions de vente de leurs produits par Internet. (https://www.ipsos.com/fr-fr/45-des-agriculteurs-se-sentent-plus-isoles-que-jamais). Ces méthodes de vente se sont accompagnées souvent de la création de « drive in » à la ferme regroupant éventuellement plusieurs producteurs locaux pour permettre aux clients de venir facilement et rapidement emporter leurs achats II est ainsi considéré que si les activités de e-commerce ont doublé pendant la crise, la vente de produits frais par Internet a triplé pendant la même période consacrant ainsi l’émergence de circuits courts de vente dans les territoires.

Télétravail. Selon les Echos (https://www.lesechos.fr/economie-france/social/sondage-exclusif-les-francais-seduits-par-le-teletravail-1204045#utm_source=newsletter&utm_medium=email&utm), ce sont près d’un tiers des actifs en poste qui ont fait l’expérience du télétravail empêchant ainsi leur entreprise ou administration de s’arrêter complètement. Pour ce faire les grands groupes internationaux ont en général disposé d’outils intégrés permettant à chacun de contribuer dans son rôle habituel au fonctionnement global de l’entreprise quelle que soit sa localisation. Pour de nombreuses PME ou ETI il a fallu improviser en combinant à nouveau visio- ou audio- conférence, courrier électronique, tableurs, éditeurs de texte souvent personnels. Néanmoins, selon le même sondage 80 % des actifs qui en ont fait l’expérience aimeraient continuer à exercer leur travail à distance, au moins en partie.

Les limites rencontrées : absence, sous dimensionnement, restriction des infrastructures numériques nécessaires et disparités sociales
Le confinement a fourni des conditions exceptionnelles d’expérimentation en vraie grandeur de nombreuses solutions numériques. Compte tenu de l’ampleur sans précédent de ces expérimentations, les infrastructures numériques matérielles ou logicielles ainsi que les applications ont été sollicitées bien souvent à leurs limites. Il est fondamental d’identifier les principales difficultés rencontrées pour y remédier afin de bénéficier de la dynamique de transformation numérique qui a été enclenchée.

Infrastructures matérielles : des communications et des moyens de calcul et d’archivage sous dimensionnés, des restrictions d’usage des terminaux injustifiées.
– Insuffisance de la couverture du territoire national par des communications fixes ou mobiles à haut débit : le plan « France Très Haut Débit » est encore insuffisamment avancé pour que chaque individu ou organisation soit en mesure d’utiliser ou créer les différents usages qui viennent d’être évoqués quelle que soit sa localisation géographique.

– Insuffisance de la bande passante locale propre à l’accès aux systèmes d’information des entreprises ou services publics ainsi que de la puissance de traitement et d’archivage de ces systèmes : pour plusieurs PME ou ETI il n’a pas été possible d’accueillir simultanément tous leurs employés en télétravail; en ce qui concerne le télé enseignement les structures publiques comme celle du CNED ont été rapidement saturées ; les hôpitaux souffrent d’une faiblesse chronique de leurs infrastructures numériques ; remarquons aussi que dans les domaines considérés ici, peu font appel à des structures d’hébergement externes permettant de mutualiser des matériels de communication, de traitement et d’archivage dans le cadre des services offerts par les architectures dites de « Cloud computing ».

– La crise a amplifié de manière considérable l’usage de téléphones portables révélant des restrictions d’usage injustifiables de la part de certains de leurs constructeurs. Cette absence de neutralité porte atteinte à la liberté de choix des consommateurs et à la libre concurrence. Dans le cas des applications de traçage numérique elle a amené des limitations arbitraires aux développeurs d’applications ainsi qu’au déploiement de politiques publiques démocratiquement consenties.

Infrastructures logicielles : absence d’architectures logicielles sécurisées et fondées sur la notion de plateforme intégrative
– Dans la plupart des cas les applications qui ont été sollicitées pendant la période de crise sont des applications autonomes (« stand-alone ») qui ne communiquent pas avec d’autres applications ou ne réutilisent pas les données qui ont pu être générées ou capturées par ailleurs. Ainsi une application de téléconsultation ne communique pas avec une application de suivi à domicile d’un patient et une fonction de suivi de parcours de soins ne peut être que difficile à élaborer compte tenu de la non-interopérabilité des données afférentes à diverses applications de suivi. De même une application d’enseignement d’une discipline donnée ne sera pas nécessairement compatible avec l’enseignement d’une autre discipline rendant difficile la mise en place d’applications génériques de suivi des élèves, de mesure de leur engagement réel, d’évaluation de leurs connaissances personnelles et de leur progression. Une plateforme intégrative va donc regrouper en son sein toutes les fonctions ancillaires utiles au développement rapide et personnalisable d’applications qui vont mettre en œuvre les usages des différents acteurs de l’écosystème de la plateforme. Ainsi elle va permettre de collecter, archiver, structurer, partager et échanger des données et les protéger. Elle va aussi fournir des traitements génériques d’analyse de données et de prédiction ainsi que des outils de gestion d’objets connectés, En ce qui concerne les applications elles-mêmes la plateforme offrira par exemple des mécanismes de configuration et d’exécution des applications ainsi que des fonctions permettant d’assurer l’extensibilité et l’évolutivité de ces applications.

– Le « système D » qui a prévalu dans de nombreux cas a ouvert des failles de sécurité béantes au sein de nombreux systèmes d’information. Le télétravail en particulier a constitué un champ privilégié pour les attaques de toute sorte. (https://itrnews.com/articles/184954/pourquoi-la-securite-est-la-grande-oubliee-de-la-generalisation-du-teletravail.html). Dans le domaine de la Santé certains hôpitaux ont dû subir des attaques par déni de service. (https://www.lemonde.fr/pixels/article/2020/03/24/en-pleine-crise-du-coronavirus-les-hopitaux-parisiens-vises-par-une-breve-attaque-informatique_6034242_4408996.html). D’autres se sont trouvés exposés à des demandes de rançons ou à l’indisponibilité de leurs données .(https://www.techopital.com/les-activites-de-deux-hopitaux-publics-ralenties-par-des-attaques-informatiques-en-mars-NS_4195.html). A nouveau la non utilisation d’une infrastructure de plateforme dûment constituée et sécurisée pour accueillir les applications et les données est en grande partie la cause de ces failles de sécurité.

Disparités sociales : la crise a accentué l’impact de la fracture numérique.
Il est clair que le recours à des solutions numériques a été très inégal au sein de la population. Les habitants des zones mal couvertes par des débits convenables ont été exclus de fait de l’utilisation permanente de certains services numériques comme la visio-conférence. Il en est de même pour ceux qui n’ont pas les moyens d’acquérir un ordinateur personnel ou un téléphone portable ou d’acheter un abonnement à Internet. Dans d’autres cas l’absence de formation à l’usage du WEB ou l’exigüité des locaux personnels pour télétravailler ou télé apprendre ont constitué aussi des motifs d’exclusion. Par ailleurs l’usage permanent, à domicile du numérique a fait naitre des situations de dépendance ou de stress préoccupantes.

Accélérer la transformation numérique
La rapidité avec laquelle une partie significative de la population s’est appropriée l’usage de services numériques nouveaux souligne l’esprit d’initiative qui a animé nombre de nos concitoyens pour créer de nouveaux services et inventer de nouvelles solutions. Cette créativité et cet esprit entrepreneurial sont exemplaires et doivent être rendus visibles à l’ensemble de la population.

Les pouvoirs publics et les responsables économiques doivent tirer parti de la dynamique ainsi imprimée pour accélérer la transformation numérique de fonctions essentielles de l’Etat ainsi que celle des entreprises tout en maîtrisant les éléments clefs de leur indépendance, ceci en s’assurant de la participation des communautés d’usage à l’élaboration des services et applications numériques.

S’agissant des usagers, l’«illectronisme» et les difficultés d’accès aux équipements d’une partie de la population devront bien entendu être pris en compte dans cette transformation. Par ailleurs, il convient de noter que la généralisation des usages du numérique accroît la dépendance au quotidien des usagers vis-à-vis de terminaux, téléphones portables ou objets connectés non européens, sujet de vigilance.

S’agissant des réseaux de communication, essentiels pour une transformation numérique accessible sur l’ensemble du territoire, l’aboutissement du plan « Très haut débit pour la France » doit être hâté, tant en fibre qu’en radio fixe et mobile moins coûteuses pour les zones peu denses.

Les efforts européens pour développer des supercalculateurs et des processeurs nouveaux doivent être poursuivis afin de créer les conditions d’un marché numérique européen unique ouvert et indépendant. Dans le même ordre d’idée, la présence en Europe de fonderies de circuits intégrés à l’état de l’art mondial doit être garantie.

Au-delà, la transformation numérique en cours repose de manière fondamentale sur l’élaboration de plates formes intégratives spécifiques d’un écosystème. Sur cette base les administrations et les entreprises doivent, pour celles qui ne l’ont pas encore fait, définir et communiquer rapidement une vision stratégique de leur activité reposant sur l’usage de données et de services numériques combinés et partagés et établir les plans d’investissement correspondants. En matière de Santé la loi « Ma Santé 2022 » a ouvert la voie à une telle vision.

En ce qui concerne l’Enseignement il est souhaitable que les Etats Généraux du Numérique Educatif contribuent significativement à l’élaboration d’une telle vision pour le monde de l’Education. Sans préjuger de leurs conclusions, ils peuvent contribuer à accélérer une politique d’expérimentation en l’appliquant à des technologies éducatives de pointe et qui permettent par exemple de personnaliser le parcours éducatif d’un élève, l’amener à profiter pour son apprentissage de divers types d’objets connectés ou avoir recours à des systèmes de réalité virtuelle ou augmentée. Ces expérimentations doivent être exploitées et valorisées à grande échelle dans le cadre d’une coopération confiante entre l’État et les collectivités territoriales.

Dans ces domaines et d’autres, l’Etat doit garantir l’indépendance des utilisateurs par rapport aux fournisseurs de solutions de « cloud computing ». En effet ce marché fait apparaître plusieurs types d’acteurs : ceux qui offrent un hébergement matériel (serveurs, stockage) aux plates formes et applications, ceux qui fournissent des logiciels de plateformes proprement dites et enfin les producteurs d’applications. Il est important de souligner que les grandes entreprises mondiales notamment celles qui sont désignées par le terme GAFAM, proposent des solutions totalement intégrées et en assure les opérations. Dans ce dernier cas il peut devenir difficile pour un utilisateur de prendre de la distance quand c’est nécessaire avec son fournisseur et garantir la protection et la confidentialité de données et applications qui revêtent un caractère stratégique ou de souveraineté. Dans ce contexte il est fondamental de souligner l’importance de l’initiative prise par l’Allemagne et la France pour organiser en Europe la fédération de clouds souverains. Cette initiative, désignée par le terme GAIA-X et soutenue par 22 grands industriels situés de part et d’autre du Rhin vise à garantir en Europe la confiance dans la collecte, l’archivage, le traitement ainsi que le partage et la circulation de données numériques.

Dans la conception d’une plateforme destinée à un écosystème donné il convient aussi d’être assuré que l’architecture et les données recueillies répondent dans la durée aux besoins immédiats et futurs de la communauté d’utilisateurs concernés. Les solutions mises en œuvre doivent pouvoir évoluer dans le temps pour permettre à tout moment le développement rapide d’applications nouvelles, innovantes et variées. L’ampleur, la profondeur ainsi que la continuité dans le temps d’une transformation numérique va dépendre pour beaucoup de la précision et de la capacité d’évolution de recueils de données telles que, dans la santé, les données médicales du patient.

Les investissements nécessaires à la numérisation des services de l’Etat ou ceux indispensables à la transformation des entreprises sont considérables. Ils doivent allier une vision court terme, qui vise à rattraper un retard acquis et ne pourra se faire dans certains cas qu’avec un recours limité à des acteurs économiques non européens, et une vision à plus long terme qui doit être préparée et constituer une opportunité de développement d’entreprises technologiques européennes.